La lutte contre la corruption au cœur de la démarche RSE du Groupe Mul - Groupe Mul
Ils sont agriculteurs et transformateurs de plantes à parfum aromatiques et médicinales du pays de Grasse depuis 1865. Le Groupe Mul est une histoire de famille dont les modes de production respectent la nature (ingrédients naturels, agroécologie…) depuis cinq générations. L’entreprise a fait de la lutte contre la corruption l’un des piliers de sa démarche RSE. Marika Bianchi, Responsable RSE du groupe depuis 2018, explique la méthode qui s’appuie sur un travail de terrain.
À L’ORIGINE DU PROJET DE LUTTE CONTRE LA CORRUPTION
La lutte contre la corruption concerne les efforts déployés pour prévenir, détecter et sanctionner les actes de corruption au sein de la société. Elle fait partie des Dix principes du Pacte mondial des Nations Unies. En France, les lois Sapin 1 (1993) et Sapin 2 (2016) abordent spécifiquement la lutte contre la corruption. La loi Sapin 2 s’applique aux entreprises de plus de 500 salariés ayant un chiffre d’affaires de plus de 100 millions d’euros et impose une obligation de vigilance qui inclut des sanctions en cas de manquement. La loi tente aussi de mieux protéger les lanceurs d’alerte dans le domaine des atteintes à la probité. La loi sur le Devoir de Vigilance (mars 2017) complète le dispositif réglementaire et s’adresse aux grandes entreprises (plus de 5 000 salariés en France et 10 000 salariés dans le monde). Les PME ne sont donc pas directement concernées par ces réglementations. Et pourtant le Groupe Mul en a fait son cheval de bataille dès 2019.
Notre démarche anti-corruption est différente de celle des grands groupes car nous sommes une PME de 110 salariés. Elle englobe plus largement des sujets sociaux et éthiques. Elle a été initiée après une étude de risques au sein de nos activités, notamment de nos approvisionnements en matières premières naturelles.
– Marika Bianchi
« Notre démarche anti-corruption est différente de celle des grands groupes car nous sommes une PME de 110 salariés. Elle englobe plus largement des sujets sociaux et éthiques. Elle a été initiée après une étude de risques au sein de nos activités, notamment de nos approvisionnements en matières premières naturelles », précise Marika. L’entreprise s’est fait accompagner par une ONG, Ressources Humaines Sans Frontières (RHSF), spécialisée sur les droits humains et sociaux (travail des enfants, travail forcé, conditions de travail décentes avec un volet éthique et corruption prépondérant). Cette ONG a la particularité de mener des actions de terrain. Elle nous a accompagnés sur le volet formation sur des sujets généraux comme les risques sociaux et éthiques, les droits humains mais aussi sur des outils très concrets comme la conduite d’interviews afin d’établir les diagnostics.
LE DÉPLOIEMENT EN INTERNE DE LA POLITIQUE ANTI-CORRUPTION
En 2019, l’entreprise a commencé par identifier quels services pouvaient être particulièrement concernés par la corruption notamment la logistique, le département commercial et les achats. Chaque service fait un audit interne chaque année et remet à jour sa propre cartographie des risques avec des indicateurs de suivi associés. L’audit externe est lui assuré par le service Achats.Dans cette lutte contre la corruption, il y a une partie très réglementaire qui prend en compte tous les comportements à avoir en cas de paiement de facilitation, d’extorsion. Elle inclut aussi un certain nombre d’outils pour se prémunir des risques en matière d’éthique et de corruption. Pour assurer un contrôle et être à jour des dispositions réglementaires, un référent politique anti-corruption assure une veille sur le sujet et continue de se former. En 2020, la démarche anti-corruption a abouti à la rédaction de la charte éthique et sociale
LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION ET LES DROITS SOCIAUX DANS LES FILIERES D’APPROVISIONNEMENT
60 % des filières du groupe sont en Europe et les autres sont entre l’Asie et l’Afrique. La question qui se posait était donc de voir comment créer des outils communs malgré une forte disparité de situations entre les zones géographiques, que ce soit sur le plan politique, social ou économique.
Nous avons commencé le programme en Bulgarie car nous avions construit depuis une dizaine d’années un partenariat avec un producteur qui transforme lui-même sa production de roses.
– Marika Bianchi
« Nous avons commencé le programme en Bulgarie car nous avions construit depuis une dizaine d’années un partenariat avec un producteur qui transforme lui-même sa production de roses damascena. La particularité de la Bulgarie, c’est qu’il y a un fort taux de corruption malgré le fait que c’est un pays de l’Union européenne. Les cueilleurs font partie de la communauté Rom qui fait l’objet de ségrégation dans certaines villes de Bulgarie. Donc il y avait deux enjeux à traiter en parallèle », indique Marika. L’entreprise a d’abord fait un diagnostic préalable, grâce à la formation dispensée par l’ONG RHSF. Des données ont été collectées d’abord sur les sites Internet de référence pour avoir une vision générale macro-économique et environnementale, avant même d’étudier les risques des pays. « Puis nous avons réalisé des cartographies de tâches », ajoute Marika. Cela va de la cueillette de la rose au transport, la transformation, etc. Qui réalise ces tâches et quels sont les risques associés au niveau social et éthique ? Une première liste d’enjeux majeurs a été établie sur le même modèle que la matrice de matérialité. Les enjeux sont d’abord identifiés puis évalués, par exemple le salaire décent et les conditions de travail. L’évaluation des risques transverses de la filière est basée sur le croisement d’informations notamment issues des interviews terrain réalisées avec des travailleurs, des médiateurs des communautés Rom, des chefs de village, etc. Les interviews ont été menées directement par l’entreprise à l’aide d’un traducteur.
« Le plan d’actions est ensuite plus compliqué à mettre en place puisqu’on parle de long terme. Nous l’avons co-construit pendant plusieurs mois avec le partenaire local pour arriver à des expérimentations d’actions. Par exemple, tous les frais ont été définis (salaires, paiement des transports…) de manière claire et transparente sur toute la chaîne d’approvisionnement et tous les maillons de la chaîne ont bien été intégrés dans la démarche », souligne Marika. Le plan d’actions a vocation à évoluer. Les objectifs prioritaires peuvent changer selon les années puisque les programmes se déroulent sur 5 ou 10 ans.
Le travail de diagnostic a duré un an et demi et a fait l’objet de plusieurs déplacements sur le terrain. Sur la même période, l’entreprise a travaillé au Laos. Puis, la même démarche a été déployée à Madagascar, sur une filière avec qui le groupe travaille également depuis de nombreuses années. « Nous avons commencé une analyse des risques en mars 2023. Nous sommes restés un mois sur place pour aller interviewer les différentes parties prenantes. Mais le contexte politique est plus compliqué pour déployer un plan d’actions immédiat. En revanche, cela a permis de tisser des liens de confiance avec les producteurs. »
Jean GAZIGNAIRE – Groupe MUL a adhéré au Pacte mondial en mars 2018. Le groupe est intégré au cercle azuréen et fait partie du groupe de travail sur les Droits Humains depuis 2020. L’intégration des Objectifs de développement durable a permis de structurer la démarche RSE. Les ODD stratégiques pour le groupe sont Industrie, Innovation et Infrastructure (ODD 9), Production et consommation responsables (ODD 12), Vie terrestre (ODD 15), Mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques (ODD 13), et le plus important pour cette thématique, Travail décent et croissance économique (ODD 8).
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