16 novembre 2023
Le Pacte mondial des Nations unies : un acteur du changement à l’ère de la CSRD
Directive CSRD : vers une responsabilité sociale renforcée du secteur privé
La Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) s’annonce comme un changement majeur s’imposant aux entreprises européennes et ses chaines de valeur. Prévue pour entrer en vigueur au 1er janvier 2024, cette directive vise à renforcer la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) : plus de 50 000 entreprises devront publier leur rapport extra-financier, détaillant leurs engagements environnementaux, sociaux et de gouvernance. Cette nouvelle directive s’inscrit dans le Pacte vert pour l’Europe, annoncé en 2019, qui vise une réduction de 55% par rapport à 1990 des émissions de gaz à effet de serre de l’UE d’ici 2030, et zéro émission nette pour 2050. La CSRD transformera ainsi la manière dont les entreprises vont opérer en Europe, avec des conséquences significatives pour leur stratégie et leur impact global, tant sur la société que l’environnement.
Conséquences pour les entreprises : un nouveau paradigme d’engagement(s)
La CSRD exigera des entreprises qu’elles adoptent une approche encore plus transparente et proactive envers leurs enjeux ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance). Les rapports extra-financiers devront couvrir des domaines majeurs tels que la gouvernance, la stratégie, les impacts durables et les performances liées à la RSE. Cette transparence accrue permettra aux parties prenantes (investisseurs, employés, clients et régulateurs) d’évaluer plus efficacement les performances des entreprises en matière de développement durable. En ce sens, l’intégration de la double matérialité (financière et d’impact) au cœur de la CSRD permettra aux entreprises d’assumer leurs externalités afin de s’engager vers une transformation durable de leur modèle d’affaires.
À partir du 1er janvier 2024, les entreprises concernées1 devront rendre compte des impacts et externalités de leurs activités sur l’environnement, ce qui inclut l’artificialisation des sols, la pollution, les répercussions sur la biodiversité ou encore les espèces animales. Elles seront encouragées à trouver des solutions pour réduire leur impact environnemental négatif et intégrer les services écosystémiques2 dans leur stratégie RSE. Enfin, les entreprises devront justifier leur action économique sous le prisme de la redevabilité.
La CSRD incitera ainsi les entreprises à adopter de nouvelles pratiques plus durables, comme l’utilisation de matières recyclables et la réduction de leur dépendance aux ressources limitées de la planète. Cela favorisera l’innovation et la créativité dans la façon dont les entreprises mènent leurs activités, les encourageant ainsi à mettre en œuvre des solutions durables, respectueuses de l’environnement et s’inscrivant dans une transition juste.
Le Pacte mondial des Nations unies : un atout stratégique pour se préparer à la CSRD
Le Pacte mondial de l’ONU offre aux entreprises un cadre de principes (les Dix principes du Pacte mondial) et un panel de services, qui permettent d’anticiper et de se préparer aux exigences de la CSRD. En adhérant au Pacte mondial, les entreprises s’engagent à respecter les Principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme (UNGP) et les Dix principes du Pacte mondial de l’ONU. Ce cadre, reconnu de façon universelle, comprend la protection et le respect des droits de l’Homme, des normes du travail, de l’environnement et la lutte contre la corruption. Au travers de ces Dix principes, le Pacte mondial des Nations unies a pour mission d’accompagner la mise en œuvre de l’Agenda 2030 et l’appropriation des 17 Objectifs de développement durable (ODD) par le secteur privé.
Ainsi, les entreprises déjà membres du Pacte mondial ont un avantage certain pour se préparer à adopter la CSRD. En effet, le respect des Dix principes, la mise en place des Principes directeurs de l’ONU et la contribution aux 17 ODD ont permis aux entreprises engagées de développer une culture de responsabilité sociale et de durabilité, bien avant que la CSRD ne devienne une réalité réglementaire. De fait, par l’intégration des principes du Pacte mondial, ces entreprises ont déjà acquis une longueur d’avance en matière de présentation de leurs impacts environnementaux et sociaux. En s’engageant pleinement au Pacte mondial, elles progressent dans leur démarche, et sont donc mieux préparées pour répondre aux nouvelles exigences en matière de reporting extra-financier imposées par la CSRD.
Le leadership des entreprises membres du Pacte mondial
Le Pacte mondial offre un cadre d’engagement universel et volontaire. Par leur adhésion et leur implication, les entreprises membres contribuent à son dynamisme et démontrent leur engagement en intégrant pleinement le développement durable dans leur stratégie. En adoptant les principes directeurs de l’ONU, ces entreprises jouent un rôle essentiel dans l’atteinte des ODD pour assurer la paix et la prospérité pour les peuples et la planète.
En conclusion, la CSRD marque un tournant majeur pour les entreprises européennes en matière de responsabilité sociale et environnementale. Cette directive représente une opportunité pour les entreprises de repenser leurs pratiques commerciales et leurs stratégies vers des modèles plus pérennes, et donc vers une architecture économique plus durable. En d’autres termes, la CSRD amène à changer le prisme de l’entreprise : la seule performance financière ne peut plus être une finalité si celle-ci porte atteinte à l’environnement ou au social ou ne s’inscrit pas dans une trajectoire de neutralité carbone. Alors que la transition vers la neutralité carbone et un monde plus viable est une nécessité, les entreprises qui adoptent de fait un modèle d’affaires plus résilient et pérenne seront mieux préparées pour faire face aux enjeux futurs. La CSRD et le Pacte mondial ouvrent la voie à un secteur privé plus responsable, éthique et respectueux de la planète, et qui créera de nouvelles possibilités d’innovation, d’investissement et d’emploi.
Des ressources pour se préparer à cette nouvelle directive
Les entreprises françaises se préparent à adopter ces nouvelles directives de reporting RSE, et ont ainsi besoin des ressources adéquates pour répondre à ces exigences croissantes en matière de durabilité. Face à la complexité des divers cadres de reporting et à la nécessité d’une mesure d’impact et d’engagement cohérente, le défi est de taille. Pour faciliter ce processus, le Pacte mondial des Nations Unies impose aux entreprises membres de remplir une Communication sur le Progrès (CoP). Précédemment sous la forme d’un rapport narratif, la CoP évolue désormais vers un questionnaire standardisé, offrant ainsi des données comparables et quantifiables au niveau mondial. Pour les entreprises, il s’agit un cadre unique de comparaison à l’échelle mondiale et qui s’inscrit pleinement dans la mise en œuvre des ODD et des Dix principes, leur permettant de rendre compte annuellement de leurs progrès et démontrer à leurs parties prenantes leurs avancées.
En parallèle, l’Académie de l’UNGC offre un ensemble complet de programmes de formations sur les thématiques des Dix principes et des ODD, permettant de se préparer de manière proactive au reporting de la CSRD. La CoP et la formation sont des atouts que les acteurs économiques ont tout intérêt à intégrer dans leur stratégie. En saisissant cette opportunité, les entreprises peuvent anticiper les futures obligations réglementaires, tout en renforçant leur leadership dans le domaine de la durabilité.
1 La CSRD s’appliquera en 2024 aux entreprises rentrant dans le champ d’application de l’actuelle directive européenne NFRD et qui publient déjà une déclaration de performance extra-financière (DPEF). Il s’agit des entreprises cotées qui ont plus de 500 salariés, et plus de 40 M€ de chiffre d’affaires et/ou 20 M€ de total de bilan. Au 1er janvier 2025, ce sont toutes les autres grandes entreprises européennes qui seront concernées par la CSRD, c’est-à-dire celles qui remplissent 2 des 3 critères suivants : 250 salariés, 40 M€ de chiffre d’affaires ou 20 M€ de total de bilan (Autorité des marchés financiers, 2023). Nb : du fait d’une modification de la directive comptable proposée par la Commission européenne, les seuils de chiffre d’affaires et de bilan ont récemment été revus à la hausse, respectivement à 50M€ et à 25M€. Un décret d’application attendu fin décembre 2023 devrait transposer ces modifications en droit français.
2 Les services écosystémiques sont les avantages que la nature apporte à la société et qui rendent la vie humaine possible. Les écosystèmes fournissent quatre types de services : les services d’approvisionnement, de régulation, de soutien et les services culturels (FAO, Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture).